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9 août 2014 6 09 /08 /août /2014 14:36

Relevé dans la revue "Eco-socialiste" - N° 4 - juin 2014

voir le site internet ecosocialiste.fr

 

"Le capitalisme, c'est autant l'exploitation de l'Homme que de la nature."

 

Qu'est-ce que la "brevetabilité du vivant" ?

Décryptage

La question des brevets déposés par des multinationales sur les plantes, des gênes, des animaux, est aujourd'hui au coeur des débats sur la place du marché et l'extension de ce qui peut être acheté ou vendu. Ce combat se révèle être également au coeur des traités de libre-échange qui se succèdent pour mieux développer ce qui est appelé la « brevetabilité du vivant ». Afin de comprendre les enjeux, prenons l'exemple de l'agriculture, devenue laboratoire de l'extension de la sphère marchande.


Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la question de l'alimentation était centrale pour la reconstruction du continent. L'agriculture dite intensive est alors mise en place. L'idée est simple : produire en grande quantité, de manière industrielle, pour nourrir les humains. Se développent alors la monoculture et la mécanisation. Les champs s'agrandissent, le maïs et le blé deviennent les cultures les plus présentes et le nombre des paysans, très important avant la guerre, diminue. Cette industrie alimentaire tend à s'étendre tout au long de la deuxième moitié du 20' siècle sur l'ensemble du globe.


Les entreprises puis les multinationales semencières investissent le marché en produisant et vendant des variétés de semences créées à partir de croisements et de sélections. Les dérives pour l'humain et l'environnement apparaissent alors clairement. 
Cette sélection des semences va de pair avec l'introduction d'intrants chimiques dans la production. Les agriculteurs, déjà endettés, doivent payer tous les ans à ces sociétés des royalties pour pouvoir planter et vendre les semences. Ces variétés sont bien souvent des hybrides, c'est à dire stériles, dont les graines ne peuvent être replantées. Ce système développé dans le monde entier concourt à l'appauvrissement des populations locales en destinant ces cultures exclusivement à l'export, et rendant les agriculteurs dépendants des produits des multinationales.


Pour les paysans ayant fait le choix de cultiver des semences de ferme, le combat contre ces entreprises est aujourd'hui quotidien quand elles vont même jusqu'à interdire leur échange entre paysans. La loi sur les certificats d'obtention végétale (COV), votée en France en décembre 2011 représente une atteinte au vivant. Le COV a été créé en 1961 par les pays européens lors de la convention de l'Union pour la Protection des Obtentions Végétales pour rétribuer le travail de recherche effectué par l'obtenteur de ce COV. Si les manipulations génétiques obtenues en laboratoire sont brevetables, les croisements sont protégés par le COV, qui, à la différence du brevet, laisse un libre accès à la ressource à des fins de recherches. Mais au quotidien pour les paysans, le système taxe l'utilisation
de sa propre récolte pour 21 semences et interdit toute réutilisation pour les autres espèces non mentionnées.


Cet exemple pose une question plus générale, celle de la brevetabilité du vivant. De plus en plus, les multinationales, et spécialement les semenciers tentent de faire breveter de très nombreux gènes, afin de pouvoir tirer le maximum de profit d'une ressource qui ne leur appartient pas à priori.


Le HCB (Haut Conseil des Biotechnologies) a rendu un avis en juin 2013 concernant la brevetabilité du vivant : si offrir une protection à ceux qui innovent est nécessaire, le gène doit lui rester en accès libre. Cette décision importante n'est pas suffisante. Les mesures concernant cette sanctuarisation du vivant doivent être prises à l'échelle européenne. Il faut reconnaître le droit aux paysans d'utiliser, d'échanger et de protéger leurs semences.


Ces mesures permettraient de conserver des semences variées, respectueuses des territoires et garantes pour les producteurs d'un revenu décent.

voir le site internet ecosocialiste.fr
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