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19 décembre 2014 5 19 /12 /décembre /2014 23:05

La CNE (Commission Nationale d'Evaluation) a rendu son rapport N° 8 (juin 2014) à l'OPECST

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RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS


Selon les dispositions de la loi de 2006, la gestion à long terme des déchets de haute activité et à vie longue (HA-VL) comporte deux volets conjoints : la séparation-transmutation des actinides qui seraient présents dans le combustible usé des futurs réacteurs nucléaires et le stockage géologique des déchets de haute et moyenne activité à vie longue dans le respect du principe de réversibilité.


SÉPARATION ET TRANSMUTATION
La loi de 2006 dispose d’associer les recherches sur la séparation et la transmutation avec les études et recherches sur les nouvelles générations de réacteurs (réacteurs à neutrons rapides, RNR, et réacteurs sous-critiques pilotés par accélérateur, ADS1).

 

Dans le cadre du programme Astrid, des options innovantes pour réaliser un démonstrateur industriel de réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium (RNR-Na) de nouvelle génération, possédant un degré de sûreté au moins égal à celui de l’EPR et intégrant les enseignements tirés des événements de Fukushima, ont été identifiées et font l’objet d’E&R pour préparer l’Avant Projet Détaillé (APD). Il s’agit d’un cœur à faible coefficient de vidange qui permet d’éviter tout emballement de la réaction de fission en cas de vidange locale du caloporteur sodium, d’un système de conversion d’énergie sodium-sodium-azote évitant tout contact possible entre le sodium et l’eau, d’une accessibilité et d’une inspection en service prévues dès la conception, et d’un récupérateur interne de corium assurant l’intégrité de la cuve en cas d’accident grave.

 

La Commission apprécie très positivement ces orientations. Elle souligne que des moyens importants seront nécessaires pour mettre en œuvre les innovations majeures du projet. En particulier, le choix des matériaux de structures du cœur et des gaines de combustible exigera un effort de recherche important qui devra s’accompagner d’une mobilisation des industries très spécialisées aptes à les produire.

 

La Commission recommande de veiller à ce que le programme Astrid puisse se développer dans toutes ses composantes sans être compromis par des contraintes de financement.

 

Les études de scénarios de la transition du parc actuel de réacteurs nucléaires et des installations associées vers un parc de RNR montrent que cette transition est réalisable dans des conditions industrielles réalistes mais nécessite des changements successifs de configuration. La transmutation de l’américium n’est réalisable qu’avec des RNR ou des ADS. La Commission demande donc qu’elle fasse l’objet d’une recherche active et qu’elle soit prise en compte dans ces scénarios.

 

Une recherche amont forte doit être maintenue dans le domaine de la chimie, dans le cadre de coopérations renforcées, car elle est essentielle pour maintenir le niveau de compétence nécessaire à la gestion d’un parc de réacteurs nucléaires recyclant tout ou partie des combustibles usés.

 

La Commission apprécie le déploiement d’une recherche pluridisciplinaire sur l‘énergie nucléaire dans le cadre de Needs, programme piloté par le CNRS. Les recherches amont doivent évidemment bénéficier d’une grande liberté d’approche puisque c’est leur rôle d’introduire des voies innovantes.

 

Cependant, il faut qu’elles soient cohérentes et crédibles. La Commission recommande que les programmes propres des organismes s’attachent à étudier aussi la faisabilité des concepts qu’ils proposent. La Commission recommande enfin que les projets de Needs soient conçus pour que la communauté nationale se fédère autour d’objectifs majeurs de l’électronucléaire et que ces projets se fertilisent mutuellement.

  • 1 Accelerator Driven System

 

STOCKAGE GÉOLOGIQUE
Le projet Cigéo a pour objectif la construction d’un stockage de déchets radioactifs HAVL et MAVL à 500 m de profondeur au sein de la couche d’argilite du Callovo-Oxfordien (COx) épaisse d’environ 130 m à l’emplacement du site de Meuse/Haute-Marne.

 

Assistée de son maître d’œuvre systèmes Gaiya, l’Andra a proposé en 2012, en conclusion d’une phase dite d’esquisse, plusieurs solutions d’ensemble pour la conception de l’ouvrage. En novembre 2013, le projet Cigéo est entré dans la phase d’avant-projet sommaire (APS). Un débat public sur le projet Cigéo s’est déroulé du 15 mai au 15 décembre 2013 sous l’égide de la Commission nationale des débats publics (CNDP). Les conclusions du débat public ont été publiées le 12 février 2014 et l’Andra a présenté son nouveau calendrier le 5 mai 2014 : l’APS sera achevé en mai 2015 et suivi de l’avant-projet détaillé (APD) finalisé en mai 2017 avec le dépôt de la DAC. La Commission note un glissement de deux ans par rapport au calendrier initial.

 

Les E&R d’avant-projets concernent essentiellement l’optimisation des exigences relatives aux alvéoles HA et MAVL.

 

L’Andra a mis en place dans le laboratoire souterrain de Bure des expériences de grande ampleur pour mesurer les variations, en fonction de la température, des paramètres physico-chimiques de l’eau porale de l’argilite du COx. Les résultats seront essentiels à la modélisation du comportement à long terme des radionucléides dans le champ proche des alvéoles HA et permettront de mieux prendre en compte les conditions de température dans les analyses de sûreté.

 

Les études de l’Andra en relation avec les alvéoles MAVL ont pour but de préciser leur géométrie ainsi que le dimensionnement des jeux entre les colis et le béton. Elles doivent être intensifiées, eu égard aux exigences de réversibilité du stockage. Par ailleurs, la Commission recommande d’amplifier la collaboration de l’Andra et des producteurs sur l’étude du comportement des colis de déchets pyrophoriques, salins et bitumeux et, plus généralement, sur l’étude des interactions entre complexants organiques et actinides. Ces études sont indispensables pour organiser le stockage des différents types de colis au sein des alvéoles et éviter tout co-stockage incompatible. Il est urgent que cette collaboration conduise à une définition consensuelle des spécifications des colis.

 

Plusieurs problèmes restent à résoudre pour maîtriser totalement le fonctionnement du stockage, notamment le dimensionnement du revêtement des galeries de transfert et des alvéoles MAVL, le dégagement d’hydrogène et le comportement à long terme de l’argilite en présence de ce gaz, les conséquences de la désaturation-resaturation du massif rocheux, la surveillance et les scellements pour lesquels la Commission demande que des essais à l’échelle 1 soient programmés in situ dès la tranche 1 de Cigéo. Selon le planning prévu maintenant, les études d’avant-projet ne seront pas terminées avant 2015.

 

Beaucoup de points doivent encore être précisés avant d’aboutir à des solutions industrielles utilisables pour la DAC. La Commission demande que l’Andra précise avant la fin de l’APS la liste des points qu’elle considère comme devant être traités avant le dépôt de la DAC, en distinguant les éléments structurants de ceux relevant d’une démarche d’optimisation.

 

L’optimisation de la tranche 1 de Cigéo est une préoccupation prioritaire de l’APS. La Commission s’inquiète que des évolutions importantes et qui ne relèvent pas d’un simple ajustement soient encore à l’étude. Cette tranche 1 sera l’occasion d’une montée en puissance industrielle de Cigéo.

 

Elle doit être l’occasion d’investigations scientifiques complémentaires.

La Commission rappelle la nécessité d’établir très rapidement le coût de la tranche 1 de Cigéo ainsi que les clefs de répartition des montants qui devront être assumés par les producteurs (investissement initial, coût de fonctionnement et tarif de dépôt des colis) au cours de l’évolution du stockage.

 

Enfin, elle souhaite que pour maximiser les retombées bénéfiques à la région qui accueille Cigéo, cet ouvrage bénéficie du label «grand chantier» comme cela a été fait pour l’EPR.

 

RÉVERSIBILITÉ
La loi de 2006 indique que le stockage profond doit être réalisé dans le respect du principe de réversibilité. Ce concept de réversibilité est introduit de façon différente suivant les pays.

 

L’Andra a porté le débat au niveau national et international. L’Agence pour l’Energie Nucléaire (AEN) de l’OCDE a défini une hiérarchie des niveaux de réversibilité pour un stockage géologique : le niveau 1 d’entreposage en surface ; le niveau 2, dans lequel des colis ont été déposés dans un alvéole ; le niveau 3, dans lequel l’alvéole est muni de son dispositif de fermeture final ; le niveau 4, dans lequel un quartier entier d’alvéoles est fermé; et le niveau 5, qui est celui de la fermeture complète du stockage, dont la sûreté est alors assurée de manière passive.

 

La Commission propose la définition suivante pour la réversibilité.

La réversibilité est un mode de gestion qui consiste à garantir aux générations futures la possibilité, à toutes les étapes du processus planifié de stockage, d’une décision de poursuivre, de marquer une pause ou de revenir éventuellement à l’étape antérieure.

Pour être effective, la réversibilité suppose la récupérabilité, c’est-à-dire la possibilité technique et organisationnelle de déplacer ou de remonter en surface les colis de déchets. Elle nécessite dans la réalisation des ouvrages une certaine flexibilité qui permette de prendre en compte les avancées scientifiques et techniques et le retour d’expérience.

 

La possibilité de changer de niveau de réversibilité doit être laissée ouverte aux générations futures. 

 

Une phase de durée raisonnablement longue doit être utilisée pour préparer le passage progressif du niveau 2 au niveau 3 des premiers alvéoles remplis. Cette période initiale d’observation, qui devra être proposée par l’opérateur, pourrait être d’une dizaine à une vingtaine d’années. Elle devrait être mise à profit pour réaliser des essais sur des alvéoles expérimentaux et pour développer et valider des moyens de surveillance.

 

La Commission n’estime cependant pas souhaitable que l’option de laisser l’intégralité du stockage au niveau 2 soit imposée par notre génération aux générations futures. En effet, cette option peut présenter des inconvénients majeurs, tant pour la sécurité en exploitation que pour la sûreté à long terme.

 

En conséquence, la Commission estime que, après la période initiale d’observation, la décision de passage d’un alvéole du niveau 2 au niveau 3 devrait être prise si sa fermeture est jugée opportune, notamment du point de vue de la sûreté.

 

DIMENSION INTERNATIONALE
Les informations sur le panorama international présentées dans le rapport N°7 restent valables.

 

La Commission a analysé la diversité des conceptions de la réversibilité au niveau international. Par ailleurs, elle présente l’organisation de la gestion, du financement et du coût prévu pour un stockage géologique en Belgique, Finlande et Suède.

 

Malgré la diversité des approches et des dispositions réglementaires, ces pays appliquent le principe pollueur-payeur, donnent la priorité à la sûreté et prévoient un financement assuré pour la construction de l’ouvrage et son exploitation pendant une durée de l’ordre du siècle.

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